L’alcool au volant, un problème de jeunes ?
Comme promis par Bernard Cazeneuve en janvier, la limite d’alcool autorisée pour les conducteurs en apprentissage et les titulaires d’un permis probatoire est passée début juillet de 0,5 g/l à 0,2 g/l. La sanction peut être radicale : 135 € d’amende et surtout retrait de 6 points, autrement dit retrait du permis (qui ne compte que 6 points pendant la période probatoire). Une mesure pour sauver les jeunes ?
Depuis le 1er juillet, la France est devenu le premier pays européen à interdire au volant l’utilisation de kit mains libres, d’oreillette ou de quelques écouteurs (sauf équipements spécifiques #business). Autre réglementation entrée en vigueur à cette date : l’abaissement du taux d’alcool autorisé pour les conducteurs dits novices. L’objectif du gouvernement est de réduire le nombre de morts sur les routes. Belle intention, mais changer cette réglementation ne conduit malheureusement pas automatiquement à des miracles.
Les jeunes, victimes de la route
D’après le Ministère de l’Intérieur, la route est la première cause de mortalité et d’handicap chez les 18-25 ans.
En 2014, 1055 personnes âgées de 15-29 ans sont mortes sur les routes, soit un tiers des 3384 tués d’après l’ONISR (Observatoire national interministériel de la sécurité routière), alors qu’ils ne représentent que 17,8 % de la population. Autrement dit, les 15-29 ans ont près de deux fois plus de risque d’être victimes d’un accident mortel que le reste de la population.
L’alcool favorise les accidents mais pas spécialement chez les jeunes
D’après le rapport de la Sécurité routière, l’alcool est en cause dans 1/3 des accidents mortels en 2014 et les 18-25 représentent ¼ des conducteurs impliqués dans ces accidents. Autrement dit, 1 accident mortel sur 12 implique un conducteur de 18-25 ans avec un taux d’alcool positif.
L’alcool au volant n’est donc pas uniquement un problème de jeunes, enfin si, mais plus souvent en tant que victime qu’en tant que responsable.
Changer la réglementation ne fait pas automatiquement des miracles
En juillet, il y a eu, d’après l’ONISR, 360 morts sur les routes soit 19,2 % de plus qu’en juillet 2014 et selon l’Observatoire, depuis le début de l’année, l’augmentation de la mortalité touche particulièrement les jeunes et les plus de 65 ans.
Mais un à deux mois est un délai trop court pour évaluer l’efficacité d’une nouvelle réglementation. Bien qu’il y ait des spécificités nationales et que les facteurs de risque s’entremêlent, on peut noter qu’à l’échelle européenne, les réglementations quant à l’alcool au volant varient entre le Royaume-Uni qui est le moins strict autorisant un taux d’alcool de 0,8g/l à tous les conducteurs et la Norvège ou la Suède qui le limitent à 0,2 g/l. De même, il y a un écart considérable entre les pays concernant le nombre de tués sur les routes pour 100 000 habitants.

Une législation plus stricte en termes d’alcool rime-t-elle avec un nombre de morts plus faible ? Pas nécessairement. La Pologne est ainsi le pays le plus durement touché par les morts sur les routes avec 11 tués pour 100 000 habitants en 2011 alors que sa réglementation est la même qu’en Norvège et Suède. Au contraire, le Royaume-Uni est le plus « laxiste » mais aussi le plus sûr (3,1 morts pour 100 000 habitants en 2011).
Et être plus strict avec les « jeunes conducteurs » quant à l’alcool est-il salvateur ? Un accident mortel sur 4 implique un conducteur novice, d’après le ministère de l’Intérieur, d’où probablement la volonté d’établir des règles plus strictes pour ces personnes. Mais attention, les conducteurs novices ne sont pas nécessairement jeunes. Certains décident de ne passer leur permis que tardivement et puis surtout, sont considérés comme conducteurs novices, les personnes ayant perdu 12 points ou s’étant fait suspendre leur permis et qui l’ont récupéré il y a moins de 3 ans. #retouràlacasedépart
Comme la France, l’Allemagne, l’Autriche, l’Italie, la Lituanie, le Luxembourg et les Pays-Bas, la Serbie et l’Espagne ont décidé d’être plus sévères avec les conducteurs novices, leur imposant des limites de 0 à 0,3 g/l. Pourtant, le nombre de morts pour 100 000 habitants n’est pas nécessairement plus bas que dans les pays moins stricts. L’alcool n’est qu’un facteur d’accident parmi d’autres. De plus, instaurer une règle ne veut pas dire qu’elle est respectée. Dans notre analyse, il faudrait donc prendre en compte l’application de la loi, les sanctions encourues, ou encore le nombre de contrôles, la sévérité des forces de l’ordre, les liens avec les autres réglementations, etc. #multifactoriel